Par Lammertyn Albert

Quand Zora bourgeonne, en 2003, à un Printemps prisé des musiciens, le groupe a déjà derrière lui deux cents concerts. A l’écoute du troisième album, « La neige sur la plage », c’est son authenticité qui frappe d’abord. Chaleur, douceur grave du grain vocal de Zohra Bensliman, lécheuse de notes comme pour en protéger et prolonger la braise. Œuvre de la régénérescence ponctuant une décade d’étouffement politico-social, le disque s’empare de cette « liberté chérie » qui permet d’avancer vaille que vaille.

La chanteuse roubaisienne évoque un album « engagé et enragé ». Fidèles aux influences d’origine, elle et son équipe taillent les mots et en jouent, sur des rythmes chaloupés.

Onze pistes certes, mais dix titres (dont un en deux versions) pour accoucher de dix années : l’exercice est équitable ! Pas un morceau pour cloner son voisin. Impossible de s’ennuyer à suivre le fil rouge ardent sur lequel funambule cette voix nourrissante, dans un mélange de fête et d’inquiétude. L’accordéon répond à la flûte, le saxo tutoie la clarinette. Léguant son titre à l’album, le duo chanté avec Franck Vandecasteele, leader de l’ex-Marcel et son Orchestre, jette une énergie façon Rita Mitsouko. La guitare de l’ex-Négresses Vertes Stefane Mellino (qui avait réalisé le premier album de Zora) s’essuie sur « Les paillassons », morceau dont Alex Bug, quant à lui, signe un remix plutôt disco.

Une préférence à avouer pour « Ventilo » : chirurgie poétique des paroles (« Si j’enfourche mon vélo, / j’évite le graveleux, / j’évite les bosses et les bleus, / je penche pour un indigo »), résonance avec certaines chansons de Souad Massi, caresse de la musique, final instrumental à couper le souffle (pour mieux écouter).

Bientôt l’été, faites le plein de neige…