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Il y a dans cet album des colères, deslarmes, des splendeurs, des tristesses, des forces, des prodiges. Ce n’est pasun gentil disque de chansons sages. Dans Droitdans la gueule du loup, Melissmell contemple la gueule cassée du monde sansdétourner les yeux. Rage, sincérité, profondeur, compassion.

En travaillant à ce deuxième album, elle n’a pas conservé ses propres chansons. Elle a décidé de ne chanter que les œuvresde Guillaume Favray, qui avait déjà signé deux titres du premier album deMelissmell, Écoute s’il pleut.

Pourquoi ? L’envie irrépressible defaire vivre des chansons qu’elle admire et qui, autrement, resteraient auplacard. « Cet album, c’est celuique Guillaume aurait pu faire, l’album qu’il aurait dû faire », ditMelissmell, admiratrice d’une écriture héritière de Jacques Brel ou de ManoSolo.

Elle a enregistré avec deux musiciens auparcours éloquent : le pianiste Matu a joué plus de dix ans avec Mano Soloet a arrangé l’album Les Années sombres (uneréférence majeure pour Melissmell et Favray) avant de partir avec Indochine, etle guitariste Daniel Jamet était dans la Mano Negra

avant d’accompagner lui aussi ManoSolo. Mais ces deux aînés (renforcés par Christine Ott aux ondes Martenot surtrois chansons) étaient aussi de vieilles connaissances : « Le hasard fait que les premiersmusiciens que j’ai rencontrés en arrivant à Paris sont les musiciens de ManoSolo. »

Cela donne une étonnante cohérence à sonparcours pourtant chaotique. « Je nesuis pas de la ville », dit-elle d’emblée. Elle vient d’un villaged’Ardèche, d’une famille « danslaquelle le texte français est très présent ». Sa mère est fan absoluede Goldman, sa grand-mère adore Desproges, elles se partagent Brel, Coluche,Brassens, Devos… « Toute la variétéfrançaise est passée chez moi », avant que Mano Solo et le punk luiretournent la tête. Dès lors, elle présente « tousles symptômes de la fille qui va devenir artiste ». Tant pis pour l’école.« J’ai fait tous les métiersimaginables quand on part de rien. Quand j’en ai eu assez d’être l’esclaveapprentie d’un patron, je suis partie sac au dos et j’ai atterri dans larue. » Elle chante sur les trottoirs en dormant dans le bois deVincennes, passe un BTS sans avoir le bac, se fait peintre en bâtiment etgraphiste, conquiert son premier public dans les bars et dans les squats. « Et la vie m’a récompensé du travailet des risques que j’ai pris. »

Mélanie est alors devenue Melissmell, pour lamélisse qui, selon la tradition, soulage « les maux des femmes »,pour Smells Like Teen Spirit, pour lemélisme, pour « Mel is Mel », pour le lys de mer fossile que l’ontrouve dans le sous-sol de l’Ardèche… Et, pendant six ans, Melissmell a écuméles scènes avec quatre musiciens rencontrés à Strasbourg et, comme elle,nourris de rock et de rage. Avec eux, elle est devenue une référence. Son Aux armes mêlant Marseillaise et Internationalea rappelé que la chanson en France peut encore refuser la tiédeur. Et lesconcerts incandescents de Melissmell réconcilient amoureux du verbe haut etfervents de l’électricité.

Armée des mots de Guillaume Favray, ellearpente avec Droit dans la gueule du loupun territoire de mélancolies véristes et de poésie noire. Elle l’avoue toutdroit : « Il s’agit de dire lavérité, quitte à se faire détester. » Mais c’est le plus sûr cheminpour conquérir les cœurs.
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